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Un combat pour l’écologie ou le sens de la terre (7° partie)

samedi 7 avril 2018, par Albertine

Sommes-nous suffisamment prêts pour menacer par la force de notre engagement quiconque constitue une menace pour notre milieu de vie ?

Il s’agit de la suite de de la réflexion sur le sens de la terre dans la culture africaine (7° partie )

La terre héritée des ancêtres

En Afrique, la terre est avant tout héritée des ancêtres. C’est une manière de dire qu’elle a son origine en un Autre qui n’est pas moi. Les chefs des terres sont justement là pour le rappeler. La terre est aussi liée au village, à la culture, à la richesse, à la nourriture. Elle rassemble et unit les membres d’un même clan. Le principe de base en Afrique est de ne pas prendre à la terre plus que ce qu’on peut lui retourner. Aller au-delà de ce principe engendre souvent des conflits.

Ce que peut apporter le sens de la terre en Afrique sur la question écologique concerne deux domaines : pratique et théorique

Domaine pratique

Sur le plan pratique, il peut aider à évaluer les répercussions des actions humaines sur les écosystèmes. En effet, le bien-être et l’épanouissement de la vie humaine et non humaine sur la terre sont des valeurs intrinsèques. De plus, la richesse de la diversité des formes de vie contribuent à la réalisation de ces valeurs. Une vision fragmentée de la terre est un obstacle à l’harmonie du milieu de vie. Il est intéressant d’observer comment nous séparons souvent le sujet de l’objet et la cause de l’effet. Par exemple, nous nous conduisons comme si nous avions un sauf-conduit pour piller les ressources de la nature sans que la planète réagisse. Nous agissons comme si nos actes n’avaient aucune conséquence. Cette vision fragmentée du réel nous mène vers une culture de l’irresponsabilité.

Domaine théorique

Du point de vue théorique, le sens de la terre en Afrique permet d’analyser dans quelle mesure la relation entre l’Homme et son milieu obéit aux fonctionnements « normaux » de la nature. Cette démarche peut aider à redéfinir notre rapport à la terre et renverser les paradigmes qui dominent lorsque nous nous situons face à elle. Autrement dit, de parasite, qui gère à sens unique de façon inégalitaire, le rapport à la nature, l’homme doit devenir « symbiote », accepter l’échange qui consiste à rendre ce que l’on emprunte. Ce changement consiste principalement dans le fait de valoriser la qualité de la Vie : « Retour donc à la nature ! Cela signifie : au contrat exclusivement social, ajouter la passation d’un contrat naturel de symbiose et de réciprocité où notre rapport aux choses laisserait maîtrise et possession pour l’écoute admirative… Le droit de maîtrise et de propriété se réduit au parasitisme. Au contraire, le droit de symbiose se définit par la réciprocité : autant la nature donne à l’homme, autant celui-ci doit rendre à celle-là, devenue sujet de droit. » (M. Serres, Le contrat naturel, Paris, Flammarion, 1990, p. 67).-----

Un combat planétaire

Malgré les conclusions que l’on peut tirer des principaux indicateurs économiques, il est impossible de dire qu’un système économique est une réussite quand la prospérité est obtenue aux dépens des générations futures et quand le nombre de pauvres ne cesse de croître. Nous sommes aujourd’hui confrontés à la terrible question de savoir si le monde dont hériteront nos enfants pourra satisfaire leurs besoins comme il satisfait les nôtres. Les décideurs politiques n’ont jamais eu autant à se préoccuper des générations futures. Toute une série d’objectifs nouveaux est donc venue s’ajouter à ceux, traditionnels, de la création d’emplois, de l’incitation à la croissance et de la distribution efficace des ressources. Sommes-nous suffisamment prêts pour menacer par la force de notre engagement quiconque constitue une menace pour notre milieu de vie.

La lutte pour un monde viable se déroule aussi bien dans les villages que dans les conseils d’administration, dans les conseils municipaux qu’à l’Assemblée générale de l’ONU à New York. Elle ne sera nulle part facile et à aucun moment on ne pourra en prévoir l’issue avec précision. Cette incertitude est le défi de notre époque. En fin de compte, nous devons nous demander jusqu’à quel point nous désirons bâtir un avenir viable pour tous. Changer pour une sobriété heureuse nous incite à arrêter de piller notre terre, de la polluer, de l’assoiffer aveuglément. Pour cela, nous devons changer radicalement nos comportements et nos priorités.

Des indicateurs économiques aux indicateurs écologiques

Nous proposons de remplacer les indicateurs actuels de PNB et de PIB par ceux d’empreinte écologique, de solidarité écologique, de temps et d’espace écologique. Ces indicateurs prendraient en compte la situation et le mode de vie de chacun, du plus pauvre au plus riche et non plus une moyenne de la richesse d’un pays qui, en soi, ne veut pas dire grand-chose. Parce que quand l’homme pollue la terre-mère, il se pollue ; quand il la détruit, il se détruit et détruit la Vie. L’homme est bien sûr capable de bâtir un monde meilleur qui ne soit pas "le meilleur des mondes". A nous d’être vigilants !

Béatrice FAYE cic

Mise en forme CEAF&RI