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Genre, fondamentalisme culutrel et/ou religieux

lundi 7 mars 2016, par Albertine

Les fondamentalismes, comme quêtes de fondements, sont aussi bien religieux, politiques que socio-culturels. Le combat des femmes est à tous le niveaux. Voici un résumé d’une étude réalisée par Albertine Tshibilondi du CEAF&RI dans le cadre de l’Institut sur le genre au CODESRIA sur le thème : Genre, Culture, politique et fondamentalisme.

Afrique une et diverse

Une remarque préalable permet d’éviter de considérer l’Afrique comme une substance unique et unifiée. C’est dire qu’il n’y a pas une philosophie négro-africaine. On ne peut parler que des philosophies négro-africaines. De même il n’y a pas une culture africaine, mais des cultures africaines. La pluralité est ici liée à l’histoire africaine qui n’a ni unité de lieu (elle s’est déroulée en Afrique, mais aussi en Europe et aux Amériques), ni unité de temps.

Diversité des situations et des contextes

Cette remarque vaut également pour la question de genre. On note une diversité de situations. Entre pays du Nord et pays du Sud, les femmes diffèrent, elles ne forment pas un groupe homogène. De même en Afrique subsaharienne, il existe des différences entre les pays, les régions et les classes sociales. Cependant, dans tous les pays du Sud (Afrique, Asie, Amérique Latine), des constantes apparaissent concernant la condition de la femme. Il existe un destin commun qui lie les femmes africaines à toutes leurs sœurs du monde, et particulièrement à celles de l’Europe occidentale auxquelles l’histoire les a souvent associées. Il existe donc une communauté de destin que l’on peut illustrer par quelques faits universellement répandus. C’est dire que les problèmes des femmes ou plus précisément les discriminations à leur encontre sont les mêmes d’un pays à un autre ou d’une région à une autre. Ils diffèrent seulement en intensité. En d’autres termes, aucun pays - développé ou en développement - ne traite ses propres femmes aussi bien que ses hommes.

Les fondamentalismes religieux, politiques, socio-culturels

Les fondamentalismes, comme quêtes de fondements, sont aussi bien religieux, politiques que socio-culturels. Face aux dérives mondialistes, aujourd’hui la tentation est grande de survaloriser la culture africaine traditionnelle, comme bouclier contre l’impérialisme culturel d’un univers mondialisé. Divers fondamentalismes politiques, économiques et religieux se greffent sur cette revalorisation identitaire. Et ce sont souvent les femmes qui en font les frais.
La tradition africaine est réputée respectueuse de la personne humaine, de sa dignité. Dans une culture de l’oralité, certains proverbes et mythes fondateurs l’expriment bien, et montrent que l’humain (Muntu) est bien différent de la chose. Mais la dignité dont il est question est-elle réservée au seul être masculin ou concerne-t-elle aussi l’être féminin (en lingala ou ciluba (langues de la RD Congo), comme dans toutes les langues bantu, il existe deux termes pour désigner l’être humain masculin et féminin, et un terme générique pour désigner l’humain, Muntu ? De nombreuses coutumes et pratiques en l’encontre de la femme posent le problème de son statut. Les mariages arrangés, la polygamie, la dot, l’excision, la soumission constituent, entre autres, des éléments de ces valeurs traditionnelles.

Le poids des traditions

Certes, il faut reconnaître des avancées dans l’évolution du statut juridique de la femme africaine, mais il reste encore beaucoup à faire pour l’égalité des droits entre les femmes et les hommes, notamment pour la femme au foyer, la femme travailleuse, la femme paysanne. Le poids vivace des traditions et coutumes freinent encore cette évolution.
Dans ce cas, ne faut-il pas poser un regard critique sur l’univers africain qui repose essentiellement sur : la croyance en l’existence de deux mondes et à leur interaction, le respect de l’autorité, le sens de la communauté, l’attachement à la vie ? Ne convient-il pas d’approcher de façon critique les valeurs de l’univers négro-africain, d’hier et d’aujourd’hui, pour en éviter toute lecture fondamentaliste ?

Auteure : Pr. Albertine Tshibilondi, CEAF&RI à l’Institut sur le genre CODESRIA, Dakar Sénégal)