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Elections en RDC : un challenge pour les femmes

mardi 27 mars 2012, par Albertine

Dens le cadre de la Journée Internationale de la Femme, Mme Louise Ngandu, politologue, livre une réflexion sur les élections en RD Congo qui demeurent un challenge pour les femmes congolaises. La parité reste un des défis....

Défis majeurs

La parité reste un des défis en RD Congo, mais les citoyennes de demain se forment dès aujourd’hui. Les défis majeurs sont bien entendu la stabilité politique, la sécurité du pays, des personnes et des biens, mais aussi la parité. Ainsi d’autres défis tels que l’éducation, l’enseignement, la santé, la réduction du chômage, la prise en charge des pensionnés et des personnes les plus démunies, la lutte pour l’égalité des chances entre femmes et hommes….guideront le vote des citoyens et principalement des citoyennes dans le choix des candidats tant au niveau national que régional.

Etant impliquée dans la problématique des femmes, je reste sensible aux questions relatives à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes. Les élections prochaines constituent une occasion importante pour propulser d’un cran les revendications des femmes. Un aperçu des défis liés à la situation des filles et des femmes en République Démocratique du Congo s’impose.

Petite et jeune fille d’aujourd’hui, femme et espoir de demain

Egalité des chances filles et garçons
Avant de parler de la petite fille congolaise, je tiens à préciser que le sort du petit garçon n’est guère enviable et que toute politique visant à l’amélioration du sort des filles doit également se préoccuper de la situation des garçons car il s’agit de les former, filles comme garçons, pour en faire des responsables de demain. Néanmoins, mon propos se limitera à la problématique des filles.

Conditions des petites congolaises
Pour comprendre la situation de la femme congolaise, appelée dans quelques mois à accomplir son devoir de citoyenne responsable dans le choix des futurs dirigeants du pays, il convient d’effectuer un retour en arrière et de la replacer d’abord dans sa condition de petite fille. En effet dans le cadre du développement à long terme, pour préparer la relève des citoyennes électrices d’aujourd’hui, il faut avoir une vue d’ensemble des conditions d’ existence de la petite fille qui sera la citoyenne de demain.-----

Citoyenne de demain

Qui est cette citoyenne de demain, qui constitue le gage d’ un développement que nous souhaitons situer dans le long terme ? Comment peut-on décrire son profil si l’on jette un regard sur l’ensemble du pays ?

- la petite fille congolaise d’aujourd’hui, c’est celle qui est privée de scolarité pour des raisons diverses dont la principale reste la pauvreté des parents. Plus de 60 % des parents ne disposent pas de revenus réguliers.

- la petite fille congolaise d’aujourd’hui, c’est celle qui est livrée au mariage précoce dès l’âge de 13 – 14 ans dès qu’on s’éloigne un peu des centres urbains, et très souvent alors, comme deuxième, troisième, voire quatrième épouse, du moins dans certains milieux. Dans la plupart des cas, dès l’âge de 20 ou 25 ans, elle est abandonnée, livrée à elle-même avec ses enfants, sans formation, sans opportunités ni moyens de se prendre en charge. Dans un réflexe de survie, elle est parfois poussée à abandonner ses propres enfants. Force est de constater ces dernières années la tendance qui consiste à abandonner les enfants aux aléas de la rue.

- la petite fille congolaise d’aujourd’hui, c’est celle qui est livrée à la prostitution dès l’âge de 8 ans, sous le regard impuissant de la société et ce pour se payer un bout de pain. Les acteurs de terrain, spécialement ceux qui s’occupent du VIH, peuvent témoigner des dégâts causés de la sorte dans cette tranche d’âge de notre population. Cet extrait tiré du Bimensuel « Les Coulisses » en dit long : « …Sexe à crédit à payer à la fin du mois. Cela se passe à 3 Km du centre-ville de Beni, au quartier Boïkene. C’est une profession qui a refusé de se voiler la face : la prostitution. Les jeunes filles et femmes congolaises venues de partout (Bukavu, Goma, Lubero, Isiro, Bunia, Kisangani …) font la loi en vendant leur charme au contingent sud’africain de la Monuc. L’opération est baptisée « Nyoka Nyoka » (….) Madame Kavira Kapanga, chef du quartier Boïkene commune de Ruwenzori en ville de Beni a finalement réuni jeudi 11 août 2005 toutes les prostituées de son entité. Près de quarante prostituées, jeunes filles et femmes dont l’âge varie entre 11 et 35 ans …. »

- la petite fille congolaise d’aujourd’hui, c’est celle qui se fait violer, au quotidien, et ce dans l’ impunité totale des auteurs de ces actes

- la petite fille congolaise d’aujourd’hui, c’est aussi celle qui, grâce à l’effort de ses parents, échappe aux dures réalités énoncées ci-haut et réussit à faire des études supérieures. Hélas, ces filles restent très minoritaires.

Ce profil peut s’étendre mais je me limiterai à ce constat.

Education pour les citoyennes de demain

Sans cette fierté et cette dignité auxquelles aspire tout être humain, sans une éducation à la base, sans un encadrement tant au niveau familial qu’au niveau de la société, comment peut-on espérer que la petite fille d’aujourd’hui participe au développement de la société congolaise ?

Les citoyennes de demain se préparent aujourd’hui. Aussi les femmes qui vont voter doivent prendre conscience des grandes responsabilités qui sont les leurs.

(à suivre...)

Louise Ngandu, Politologue

Présidente honoraire de l’Union des Femmes Africaines (UFA)

27/3/2012

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